« Il faut apprendre à pousser ». Et si justement, aucune femme n’avait besoin d’apprendre à expulser son bébé? Les cours de préparation à la naissance évoquent la manière dont une femme doit pousser. Comment, en théorie, elle devrait pousser!
En apnée, poumons pleins.
Regardons tout cela de plus près
Pourtant, cette méthode est préjudiciable en premier lieu pour le périnée de la maman. C’est en quelque sorte une façon de forcer le passage. L’intense pression exercée sur ce muscle ne lui laisse pas le temps de s’irriguer convenablement pour permettre un maximum d’élasticité. C’est favoriser le risque de déchirures, d’hémorroïdes, de descentes d’organes, de perte de tonicité, pour ne citer que quelques exemples du lot de réjouissances qui peuvent s’en suivre.
D’autre part, cette respiration saccadée de la maman prive le bébé de l’oxygène nécessaire. Si cette phase d’expulsion est longue, cela peut conduire à une détresse fœtale par manque d’oxygène. Cela peut également engendrer panique et actes médicaux en tout genre.
Par ailleurs, cette méthode a tendance à positionner la maman en tant qu’élève qui « doit » s’exécuter face à des consignes extérieures, ce qui peut la couper de ses propres ressentis, générer stress et frustration, sentiment d’incompétence et d’impuissance.
Sur quoi se base-t-on pour évaluer la poussée?
Les professionnels se fient à la dilatation du col (mesurable approximativement) et à son effacement présumé (impossible à mesurer) pour déterminer le moment opportun pour commencer à pousser. Ces mesures sont sommes toutes assez aléatoires.
Malheureusement, ce n’est pas parce qu’un col est jugé ouvert à 10 que la poussée doit commencer. L’envie de pousser se manifeste lorsque le col est complètement remonté (complètement effacé). Et cela ne peut pas se mesurer, car le col est hors de portée. Pourtant, cet effacement complet est capital pour permettre le bon déroulement de la poussée.
Le col et l’utérus étant composé de muscles, ils se préparent et se positionnent grâce aux contractions pour potentialiser leur force et aider bébé à descendre. Après la dilatation complète, les contractions continuent de tirer le col vers le haut du petit bassin et la poussée (dirigée) incite le bébé à descendre et donc à pousser le col vers le bas. Cela tire vers le bas l’utérus et son segment inférieur et fera perdre à la femme la tonicité de ses muscles. (Forces contraires exercées sur les muscles).
De plus, après la dilatation complète, arrive souvent une phase de latence, bénéfique pour que la maman reprenne des forces et pour le bébé, qui lui aussi refait le plein d’énergie, et se prépare à sortir. Il ne faut pas oublier que maman et bébé travaillent de concert à la naissance, et que c’est une épreuve considérable pour l’enfant que de se mettre au monde.
Respecter et être à l’écoute du corps de la maman est une façon de respecter le rythme du bébé, qui est finalement le mieux placé pour savoir ce dont il a besoin pour sortir de son cocon.
Le corps de la femme sait faire
Il serait profitable pour l’immense majorité des mamans, d’être convaincue que leur corps saura faire. Une poussée se ressent, ne se contrôle pas. Apprend on a qui que ce soit comment pousser pour déféquer? C’est un acte physiologique, naturel et le corps sait instinctivement comment faire, pour peu qu’on soit à son écoute. Faire naître un bébé est tout aussi naturel.
Par ailleurs, la position de la maman est primordiale pour que les poussées soient efficaces. La gravité et la mobilité aident à faire descendre le bébé et permettent au bassin de la maman de se modifier pour la naissance. La position gynécologique est un non sens absolu, car elle bloque les structures mobiles du bassin de la maman. Les pieds surélevés dans les étriers referment l’ouverture du bassin, ce qui rend très difficile la progression de l’enfant hors de l’utérus.
Alors, la maman doit déployer une énergie incroyable en n’étant pas aidée par la gravité pour pousser, elle se fatigue, abîme son périnée sur lequel une pression incroyable est exercée. De son côté, l’enfant ne dispose pas du temps dont il a besoin pour progresser dans le canal de la naissance. Il est forcé d’avancer, bloqué à cause du manque de mobilité du bassin de sa maman, ce qui peut légitimement causer un stress important pour lui. La respiration bloquée de sa maman, sur une durée plus ou moins longue, diminue les apports en oxygène vers le placenta et donc vers le bébé.
Tombe alors différents verdicts…
- Vous ne poussez pas correctement.
- Les poussées sont inefficaces.
- Le cœur du bébé ralentit.
- Il va falloir faire une césarienne / utiliser forceps / ventouse / faire une épisiotomie.
Non. Tout ceci n’est pas une fatalité. Tout ceci pourrait être évité dans la grande majorité des cas.
Laisser la maman être à l’écoute de son corps. Lui demander quand ELLE elle ressent l’envie incontrôlable de pousser. La laisser libre de ses positions. L’encourager à aller au rythme de ses contractions. À parler a son bébé. L’aider à se concentrer sur des respirations profondes. Éviter les intrusions dans son intimité, qu’elle soit physique ou émotionnelle. Favoriser la confiance, l’encourager dans ses compétences.
Laisser la maman libre de pousser exactement comme son instinct le lui dicte (ce qui nécessite donc de refuser la péridurale pour conserver la conscience de son corps), serait peut être la clé pour moins médicaliser les naissances. Rendre à la maman son pouvoir de donner par elle même la vie serait la clé pour une plus grande satisfaction de l’expérience autour de l’enfantement. Ce qui ensuite, aura des conséquences positives sur le lien d’attachement mère-enfant.
Le rôle de la doula
Et si, plutôt que d’apprendre à une maman une poussée artificielle, on lui proposait plutôt de se préparer en travaillant sa respiration, son lâcher-prise, sa confiance en elle et en son corps. En lui montrant différentes positions qui sont particulièrement bénéfiques pour la progression naturelle du bébé. Et si on lui montrait comment travaille son corps durant l’accouchement et le chemin parcouru par le bébé. Si on lui permettait de comprendre chaque étape, en passant par des schémas, vidéos explicatives, maquettes…
C’est alors que le rôle de la doula peut avoir une importance qui fait la différence, dans son rôle d’information et d’accompagnement, par exemple grâce à un projet de naissance.
La poussée est trop souvent banalisée. Pourtant, c’est un moment clé dans l’accouchement, qui aura des conséquences sur le vécu du post partum.
Par Maude Saury
étudiante à la certification Doula & coach périnatal en ligne de la Faculté École Doula de l’École internationale d’accompagnement Cybèle
Rejoignez le groupe d’informations de la Faculté École Doula Cybèle